Quelles sont vos influences ?

Même si je regarde beaucoup le travail des autres plasticiens comme Gilles Aillaud ou Romain Bernini, je crois que graphiquement, la seule référence qui m’a vraiment marquée c’est Albrecht Dürer. Je suis totalement fan de ses dessins d’animaux. Mais si on s’engage plus sur le fond, mes références sont davantage musicales que plastiques. Je tire l’énergie qui va rythmer mes coups de pinceaux ou ma façon de modeler des nombreux concerts que je fréquente. Rock anglais et post punk principalement. À mon goût c’est dans le live que fermente la maïeutique de mes œuvres car je recherche davantage un mouvement, ou une gestuelle plutôt qu’une appartenance à une groupe particulier.

Quant aux sujets que j’aborde, ils découlent directement de ma vie de tous les jours et notamment des observations entre mon lieu de vie et mon atelier. C’est aussi un regard sur mes origines avec des attaches rurales qui ont posé mes premières compositions.

Vos obsessions ?

J’aime quand il y en a beaucoup. J’apprécie une certaine forme de saturation. J’ai toujours vécu entourée de beaucoup de monde, alors dans mes réflexions diverses et variées, c’est pareil : il faut qu’il y en ait partout. Pour moi c’est une forme de générosité, j’aime remplir !
En peinture, je compose des hors champ, pour saturer les formats jusqu’à en sortir.
En sculpture, je travaille mes animaux souvent par groupe, je cherche toujours qu’ils arborent une grande diversité d’expressions et de couleurs.  Je cherche aussi un dialogue entre eux qui ne peut venir que par la diversité.

Tordre les formes. Colorer les gris. Explorer de nouvelles touches en peinture. Chez moi ça passe souvent par la découverte de nouveaux paysages, donc voyager ! Peindre plus animaux aussi.
J’aimerais aussi créer plus de ponts entre mes peintures et mes sculptures, que l’une et l’autre s’influencent davantage.
Je réfléchis également à de nouvelles sculptures monumentales comme Hannibal le mammouth que j’ai réalisé pour le Vent des forêts en 2016 : ça pourrait prendre la forme de grands animaux ou d’une foule de plein de petits. Actuellement je travaille sur une grande course de lapins.
J’ai aussi pensé à mélanger certaines espèces mais pour l’instant, ça reste à l’état de croquis.

Parlez-nous de l'une de vos réalisations ou expositions dont vous êtes le/la plus satisfait(e) et/ou qui vous a rendu(e) heureux(se)

Le laocoon. C’est de la céramique : un renard se fait attaquer par un poulpe. Le renard est dressé sur ses quatre pattes, chacune bien tendue. Le poulpe s’est fixé sur la nuque du goupil et ses pattes s’enroulent autour du canidé en faisant des arabesques. C’est comme le final d’un ballet.

J’ai modelé ces deux animaux parce que dans l’antiquité, les grecques aimaient opposer leurs deux formes d’intelligence. Moi, ce sont des bêtes que j’affectionne particulièrement. Et cette tension autour du renard m’a rappelé cette sculpture du Laocoon exposée au Vatican, où un homme se fait occire par des serpents devant ses fils.
J’en ai fait une autre version où le renard est assis, c’est plus calme et l’ai appelée Guerre froide. La rencontre improbable qui n’est rendue possible que par le modelage, c’est un concept que j’aimerais continuer à développer.

Emmenez-nous quelque part

J’aime les forêts pluviales. L’une d’entre elles a particulièrement retenu mon attention dans les Blue Mountains à l’Ouest de Sydney. Comme l’espace est assez vallonné, l’acoustique est très intéressante et ça résonne bien. Il n’y fait jamais trop froid et l’humidité est élevée ce qui permet une végétation dense. D’ailleurs il y a différentes strates de végétations, c’est absolument splendide, presque baroque. Les oiseaux y donnent un concert perpétuel. Les temps de silence y sont marqués lorsqu’un nuage passe devant le soleil, à ces moments-là on n’entend plus que le vent frôler le feuillage et les branches craquer entre elles. Ces forêts et leur ambiance si unique m’ont inspiré beaucoup de croquis, 7 ans plus tard ils m’inspirent encore de nouvelles toiles. Bien que touché par les récents incendies, l’endroit n’a pas été complètement dévasté, une partie de ces merveilles existe donc toujours.